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Ses champs, bariolés comme un riche tapis,
Plaines que des plaines prolongent;
L'eau vaste et froide au nord, au sud le sable ardent
Se disputent l'Égypte : elle rit cependant
Entre
ces deux mers qui la rongent.
Trois monts bâtis par l'homme au loin perçaient les cieux
D'un triple angle de marbre, et dérobaient aux yeux
Leurs bases de cendre inondées;
Et, de leur faîte aigu jusqu'aux sables dorés,
Allaient s'élargissant leurs monstrueux degrés,
Faits
pour des pas de six coudées.
Un sphinx de granit rose, un dieu de marbre vert,
Les gardaient, sans qu'il fût vent de flamme au désert
Qui leur fît baisser la paupière.
Dix vaisseaux au flanc large entraient dans un grand port.
Une ville géante, assise sur le bord,
Baignait
dans l'eau ses pieds de pierre.
On entendait mugir le semoun meurtrier,
Et sur les cailloux blancs les écailles crier
Sous le ventre des crocodiles.
Les obélisques gris s'élançaient d'un seul jet.
Comme une peau de tigre, au couchant s'allongeait
Le
Nil jaune, tâcheté d'îles.
L'astre-roi se couchait. Calme, à l'abri du vent,
La mer réfléchissait ce globe d'or vivant,
Ce monde, âme et flambeau du nôtre;
Et dans le ciel rougeâtre et dans les flots vermeils,
Comme deux rois amis, on voyait deux soleils
Venir
au-devant l'un de l'autre.
-Où faut--il s'arrêter? dit la nuée encor.
-Cherche! dit une voix dont trembla le Thabor.
Victor
Hugo, Les Orientales, I.
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